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Justice Administrative de DEmain - 4 novembre 2016


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16112016

Justice Administrative de DEmain - 4 novembre 2016

Par Sylvain Pontier


Le décret n° 2016-1480 portant modification du code de justice administrative (CJA) a été publié au JO du 4 novembre 2016 pour une application à compter du 1er janvier 2017. Il porte le doux surnom de JADE (Justice Administrative de DEmain) car inspiré des travaux du groupe de travail du même nom.

 

Il doit répondre à 4 objectifs : accélérer le traitement de certaines requêtes ; renforcer les conditions d’accès au juge ; dynamiser l’instruction ; améliorer l’organisation et le fonctionnement de la juridiction administrative. 

I Introduction du contentieux

A)   Sur l’obligation de recourir à un avocat (modification de l’article R. 431-3).

 Le décret prévoit la suppression de la dispense d'avocat pour les litiges de travaux publics et d'occupation contractuelle du domaine public ainsi que pour les appels en matière de fonction publique.

 En revanche, extension de la dispense d'avocat à tous les contentieux sociaux, c'est-à-dire les litiges « en matière de prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi »

B)    Sur la liaison du contentieux (modification de l’article R. 421-1)

La modification par l’article 10 du décret de l’article R. 421-1 en matière de litiges de travaux publics est sans doute l’une des modifications les plus emblématiques de ce décret du 2 novembre 2016.

La dispense de liaison du contentieux qui existait pour les litiges de travaux publics est ainsi supprimée:

"Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée".

Par ailleurs, le même article renforce l’obligation de liaison du contentieux pour les demandes tendant au paiement d’une somme d’argent, c’est-à-dire pour tout le contentieux indemnitaire.

Le juge ne pourra désormais être saisi que si une décision de rejet par l’administration est préalablement intervenue :

"Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle."(R. 421-1 al2) 

Cette disposition a visiblement pour objet de mettre en échec la jurisprudence, qui admettait jusqu’ici que la demande soit faite après l’introduction du recours contentieux (cf. CE, 11 avril 2008, Établissement français du sang, n° 281374),  ou, à tout le moins, que la requête introductive soit déposée avant que n’intervienne la décision implicite ou explicite de rejet. 

C)   Délais de recours (modification de l’article R. 421-3)

L’article 10 du décret du 2 novembre 2016 prévoit la suppression de l’exigence d’une décision expresse de rejet pour faire courir le délai de recours en matière de plein contentieux.

L’article R. 421-3 du Code de justice administrative est ainsi modifié :

« Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet :
1° En matière de plein contentieux ;
1° Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, si la mesure sollicitée ne peut être prise que par décision ou sur avis des assemblées locales ou de tous autres organismes collégiaux ;
2° Dans le cas où la réclamation tend à obtenir l'exécution d'une décision de la juridiction administrative ».  

Le plein contentieux est donc désormais régi par les règles habituelles du contentieux administratif permettant de rejeter implicitement une demande indemnitaire préalable. C’est donc, en matière de plein contentieux également, l’article R. 421-2 qui va s’appliquer.


II Vie du contentieux

A)  La généralisation de la cristallisation des moyens.

L’article 16 du décret du 2 novembre 2016 introduit le dispositif de « cristallisation des moyens » en contentieux administratif. Cette procédure, qui existe déjà en contentieux de l’urbanisme, permet aux juges administratifs de fixer par voie d’ordonnance une date à compter de laquelle les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux.

Il est précisé que les parties doivent en être informées au moins un mois avant la date de cristallisation des moyens. Par ailleurs, le juge administratif peut librement procéder au retrait de cette ordonnance. 

En parallèle, l’article 33 du décret du 2 novembre 2016 abroge l’article R. 600-4 du code de l'urbanisme relatif à la procédure de cristallisation des moyens, dès lors que ces dispositions ne constituent plus une particularité du contentieux de l'urbanisme.

On ne peut que saluer cette disposition qui permettra, à coup sûr, d’accélérer le traitement des recours administratifs.

B) Sur le désistement d’office pour défaut de production d’un mémoire récapitulatif

L’article R. 611-8-1 du code de justice administrative prévoit la possibilité pour le juge administratif de demander à l'une des parties à l’instance de reprendre, dans un mémoire récapitulatif, les conclusions et moyens précédemment présentés.

L’article 17 du décret du 2 novembre 2016 insère un second alinéa à cet article, qui autorise le juge administratif à fixer un délai à l'issue duquel, à défaut d'avoir produit le mémoire récapitulatif, la partie est réputée s'être désistée de sa requête ou de ses conclusions incidentes.

La partie concernée doit nécessairement être informée des conséquences du non-respect du délai fixé. 

Si cette disposition est utilisée (ce dont on peut difficilement douter), elle constituera une arme redoutable pour les magistrats pour contraindre les Avocats à rédiger des mémoires récapitulatifs dans des délais contraints.

C)            Sur le désistement d’office pour « perte d’intérêt » de la requête

L’article 20 du décret du 2 novembre 2016 prévoit une autre hypothèse, de désistement d’office, pour « perte d’intérêt » de la requête.

Le juge administratif a désormais la possibilité, lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur « l'intérêt que la requête conserve pour son auteur », et de l'inviter à en confirmer le maintien dans un délai fixé. A défaut de réponse, le requérant sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions.

Il s’agit là encore de réduire le nombre d’affaires pendantes. Toutefois, il s’agit ici d’une exigence de bon sens qui trouvera sans doute à s’appliquer.

D)            Sur les mesures d’instruction postérieures à la clôture d’instruction

L’article 21 du décret du 2 novembre 2016 prévoit la possibilité pour les juges administratifs d’inviter une partie à produire des éléments ou pièces en vue de compléter l'instruction, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Cette demande n'a pour effet de rouvrir l'instruction qu'en ce qui concerne ces éléments ou pièces.  Cette nouvelle possibilité évitera la pratique actuelle qui consiste à rouvrir et refermer immédiatement l’instruction pour permettre la production de pièces sollicitée par la juridiction.

 

III Les nouveaux pouvoirs des juges.

 Le décret procède à l'élargissement des possibilités de rejet par ordonnance dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel. Des ordonnances de séries pourront désormais être prises par les tribunaux sur la base d’un arrêt devenu irrévocable de la cour administrative d’appel dont ils relèvent. 

Les requêtes d’appel « manifestement dépourvues de fondement » pourront être rejetées par ordonnance (article 3 du décret, article R. 222-1 du code de justice administrative).  Cette possibilité existait déjà mais elle est élargie et les magistrats des cours administratives d’appels entendent bien en faire usage.

Les pourvois en cassation dirigés contre des arrêts pourront être rejetés par ordonnance s’ils sont « manifestement dépourvus de fondement » (article 31 du décret, article R. 822-5 du code de justice administrative).

L’article 24 du décret du 2 novembre 2016 modifie l’article R. 741-12 du code de justice administrative, en augmentant le montant maximum des amendes pour recours abusif (On passe de 3.000 à 10.000 €). L’utilisation de cette amende restera sans doute anecdotique (aujourd’hui rarissime) mais peut avoir un effet dissuasif et, de la sorte, réduire le contentieux.

De manière plus anecdotique enfin, les pouvoirs des greffiers son renforcés (art R. 226-1 notamment).

 

A propos de l'auteur : Sylvain Pontier

DESS de droit des Affaires Internationales
Diplôme de Juriste Conseil d'Entreprise
DEA de droit public

13 cours Pierre Puget - 13006 MARSEILLE

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